Le livret des "Troyens", que Berlioz écrivit lui-même, méritait à lui seul une étude détaillée. Contrairement à sa réputation paresseusement recopiée, il ne déçoit que ceux qui y cherchent ce qui ne s'y trouve pas. Sortant des voies battues du drame théâtral habituel avec ses noeuds et ses dénouements, il apparaît comme une authentique tragédie, d'une originalité totale en son temps. Celle de la nécessité implacable d'un destin qui écrase les hommes et de l'aveuglement que ces derniers lui opposent de façon dérisoire. Insupportable répétition d'enchaînements tragiques imposés d'en haut par des dieux essentiellement absents. Jusqu'à l'ultime sursaut de l'héroïsme humain, celui du rejet désespéré de ces dieux indignes. Berlioz, aux antipodes de Wagner, et aux côtés de Sophocle, de Shakespeare... et de Nietzsche.