J'ai quatre-vingts ans, j'ai fait fortune, oui, mes trésors sont les souvenirs enfermés en moi comme des oiseaux multicolores dans une cage dorée. Ils s'agitent suivant les jours, se bousculent, veulent sortir, envahissent mon esprit. Je ferme les yeux, ils arrivent, je leur dis : " Non, non, pas tous à la fois, doucement, je ne peux m'occuper que d'un seul pour pouvoir le caresser, le retourner, le regarder, lui donner vie, oui c'est ça, un seul ". Antonia avait quatre ans lorsqu'un train affrété à cet usage accueillit les réfugiés politiques, les réfugiés vaincus, en février 1939. Ce train s'est arrêté à Alençon. C'est ainsi que débute l'enfance d'Antonia dans cette Normandie si chère à son cur. Quelques mois plus tard, ce fut la guerre en France la Seconde Guerre mondiale et son cortège d'événements tragiques. Puis en 1945, enfin la paix. Le bonheur dans un pays aimé. Un vécu inoubliable.