" Une vie sans réflexion ne vaut pas la peine d'être vécue ", jugeait le Socrate de Platon. Cet apophtegme, José Voss l'a fait sien, lui qui, durant plus d'un demi-siècle, a consigné ses idées et - on ne pense jamais seul - celles des autres. Œuvre d'un diariste philosophe, Graffiti est un recueil de pensées, lesquelles, ordonnées sur la flèche du temps, confèrent à l'ensemble une allure autobiographique. En optant pour le chronologique, l'auteur trace, en effet, un chemin bien à lui, entre philosophie et vie, citations remarquables et réflexions personnelles, développements philosophiques et descriptions factuelles, alternant aphorismes et boutades, mêlant allègrement le subjectif et l'objectif, le subtil et le futile, l'universel et l'individuel, et ce sans jamais se départir d'une lucidité à toute épreuve. Plus essentielle est la mise en perspective historique, qui permet de retracer, à la faveur de " tags " ou " graffiti " s'échelonnant sur la durée d'une existence, un cheminement idéel sui generis, un itinéraire spirituel personnel. C'est donc bel et bien d'une évolution intellectuelle, d'un parcours existentiel qu'il s'agit, où l'orientation résulte moins d'un but poursuivi que de la succession temporelle d'étapes toutes minutieusement datées. Et si le tragique par excellence qu'est la mort occupe une place de choix dans la réflexion de José Voss, au point d'en constituer quelque chose comme un leitmotiv, cela ne signifie pas pour autant que, pour l'auteur, la vie ne vaut pas la peine d'être vécue. La pensée de la mort, n'en déplaise à Spinoza, est une raison d'aimer davantage la vie.